Les joueurs du Patience Football Club, une des équipes réunissant chrétiens et musulmans à Jos , le 14 mai 2021

Pendant des années, la ville de Jos, dans le centre du Nigeria, a été considérée comme l'épicentre des tensions religieuses entre chrétiens et musulmans, mais des chefs communautaires ont décidé de réunir la jeunesse divisée autour d'une même passion: le football.

Les violences ont atteint de tels sommets que certains quartiers chrétiens ne toléraient aucune présence de musulmans, et vice-versa, sauf à transformer les confrontations en bain de sang.

Il n'y avait aucune confiance entre les deux communautés, ni aucun signe d'apaisement jusqu'à la mise en place de plusieurs programmes, par des leaders communautaires ou le gouvernement local, pour les forcer à se retrouver et à dialoguer.

Salis Muhammad Abdulsalam est l'un d'eux. Il a arpenté chaque quartier, chaque rue, pour recruter de jeunes joueurs provenant de 20 communautés différentes pour finalement fonder des équipes aux noms aussi poétiques et bienveillants que FC Amour, FC Unité ou encore FC Patience et FC Pardon.

Dernièrement, ces deux équipes se sont d'ailleurs rencontrées pour la finale du championnat au stade de Rwang Pam Township. Et tout est une question d'image. 

Deux joueurs - un musulman et un chrétien - se tenaient côte à côte avec le ballon en équilibre entre eux dans un symbole d'unité et dans les gradins aussi, une bannière encourageait à la paix.

"A chaque fois qu'ils se rencontrent, qu'ils s'entraînent ensemble, ils bâtissent un peu plus d'unité et construisent un esprit d'équipe qui atténue les rivalités et la méfiance", raconte à l'AFP Salis Muhammad Abdulsalam, leur entraîneur.

Pour Amaechi Johnson, un joueur chrétien du FC Patience, cette initiative a d'ores et déjà porté ses fruits, puisqu'il peut désormais se rendre dans les quartiers musulmans, et s'y sent même bien accueilli.

"Ce sont des endroits où on n'était jamais allé avant", raconte-t-il. 

L'ancienne cité de Jos, autrefois un haut lieu du tourisme grâce à son climat tempéré, se trouve sur la ligne de séparation géographique entre le nord musulman et le sud chrétien du Nigeria, pays de 200 millions d'habitants divisé à parts quasi-égales entre les deux grandes religions. 

Mais les tensions des dernières années ont été davantage exacerbées par des clivages politiques et une dispute autour de l'accessibilité des terres fertiles.

En septembre 2001, une envolée des violences avait fait plus de 900 morts selon l'ONG Human Rights Watch. 

En novembre 2008, au lendemain d'élections générales, des tueries avaient fait 761 morts. En janvier 2010 à nouveau, plus de 300 personnes avaient été tuées.

"Il y a encore quelques années, la ville était sous tension presque quotidienne. Mais ca fait un petit moment maintenant que les choses se sont calmées", rapporte Irmiya Werr, membre du gouvernement local, mis en place en 2015 et qui a beaucoup oeuvré pour réconcilier les communautés.

"Des programmes comme ceux-là peuvent aider à promouvoir la paix, et une paix durable".