Le Portugais Jose Mourinho, alors entraîneur au Real Madrid, lors d'un match contre le Los Angeles Galaxy, à Carson en Californie, le 2 août 2012

Après ses passages ratés à Manchester United et Tottenham, la nomination de José Mourinho à la Roma mardi a stupéfait en Angleterre où, au-delà du déclin dans les performances de ces équipes, il laisse le souvenir d'une personnalité controversée, pour ne pas dire toxique.

"L'un des deux meilleurs entraîneurs au monde", avait fanfaronné le président des Spurs, Daniel Levy, à l'arrivée du "Mou", devant les caméras d'Amazon Prime qui suivaient le club pour la série documentaire "All or Nothing".

Les objectifs ne sont plus là pour capter son sentiment à l'heure actuelle et le Portugais a probablement perdu quelques places dans son classement.

Comme dans toutes les histoires qui finissent mal, il est compliqué de savoir ce que pèsent les moments de bonheur - réels - passé la rupture acrimonieuse.

A Old Trafford et au Tottenham Hotspur Stadium, la case "succès" de son CV n'est pas restée vide: une Ligue Europa remporté en 2017 avec les Red Devils, une qualification européenne inespérée l'an dernier et une première place en début de saison, avec les Spurs.

- Paranoïa et terres brûlées -

Mais bien qu'il ait juré entre les deux avoir changé, les scénarios ont des similitudes plus que troublantes, qu'on retrouve aussi à Chelsea, surtout lors de son second passage, ou au Real Madrid (2010-2013).

A chaque fois, les premiers temps sont encourageants, le football n'est pas génial, mais les résultats sont là à l'image du titre de champion d'Espagne conquis en 2012... jusqu'au moment où la machine se grippe à force de tourner toujours sur le même schéma limité, à attendre la faute de l'adversaire et jouer sur ses faiblesses à lui, plutôt que sur ses propres forces.

Et la chute est alors assez rapide, émaillée de matches indigents après lesquelles Mourinho se lance dans des diatribes quasi-paranoïaques à la Terre entière contre les arbitres, la VAR, l'adversaire, les médias ou pire, ses propres joueurs qu'il jette en pâture sans vergogne et prend publiquement en grippe, même si certains - ses chouchous - lui restent éternellement fidèles.

A Madrid, "Mou" bénéficiait ainsi du soutien inconditionnel du président Florentino Pérez, qui disait voir en lui le "meilleur entraîneur" qu'il ait jamais nommé. Mais le Portugais avait tellement tendu l'atmosphère autour du club et de la rivalité Real-Barça, devenue irrespirable, que l'image du légendaire gardien Iker Casillas, accusé d'être une "taupe" au profit de certains journalistes, a été durablement entachée, jusqu'à précipiter un départ de son club de toujours en 2015.

De fait, Mourinho ne se "contente" pas d'échouer, il laisse derrière lui des terres brûlées, des vestiaires divisés, des effectifs rincés, des directions déboussolées qui mettent du temps à s'en remettre.

"Il a complètement aspiré toute notre culture hors du club et détruit tout ce que les Spurs avaient représentés pendant des années", s'était lamenté, après son départ, une source du vestiaire à la revue en ligne The Athletic.

- "Je vais attendre un peu" -

Son rebond rapide à la Roma aura au moins le mérite, selon la presse, d'économiser au club londonien plus de 15 millions d'euros de dédommagement au Portugais, qui n'a manifestement pas perdu la main quand il s'agit de négocier ses contrats.

Quant à savoir ce qui fait croire à la Roma qu'il en ira différemment avec elle qu'en Angleterre...

Peut-être cette saison hors-norme, avec le contexte de la pandémie qui a condensé le calendrier, les Spurs ayant en plus à disputer des tours préliminaires pour accéder à la Ligue Europa, mérite d'être avancée pour sa défense.

Le principal intéressé assurait en tout cas le 1er mai encore ne pas avoir l'intention de revenir rapidement au football, dans le Times.

"Je n'ai pas de projets. Je continue ma vie normale. Je me sens frais. Je me sens calme. Je suis en vacances", racontait-il.

"Je vais attendre un peu avant de revenir au football. Pas juste le bon club, mais la bonne culture. Peut-être que la saison prochaine, ce sera un peu tôt", avait-il ajouté.

Trois jours plus tard, il signait à la Roma où ses aventures feront certainement encore les délices des médias anglais et européens.